Petit Paysan, grand film

Il semblait être l’outsider des Césars. Pourtant, Petit Paysan, le succès surprise de Hubert Charuel (500 000 spectateurs) a raflé 3 récompenses majeures le weekend dernier dont celui du meilleur premier film. Un triomphe inattendu qui va considérablement re-booster la carrière de ce film.

Pierre (interprété par Swann Arlaud, césar du meilleur acteur) est éleveur de vaches laitières dans un coin de la campagne française. Alors que des premiers cas d’épidémie s’abattent sur la France, une de ses bêtes semble infectée. Pierre demande l’aide de Pascale, sa sœur vétérinaire (Sara Giraudeau, césar de la meilleure actrice dans un second rôle) pour examiner la bête et ne décèle qu’une simple inflammation. Pourtant, Pierre prend peur pour son troupeau, persuadé qu’il s’agit bien là d’un début d’épidémie. Mais ce risque d’infection est-il vrai ou le fruit de l’imagination du « petit paysan » ?

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Swann Arlaud impressionne dans le rôle-titre

Mais au-delà de son postulat, mêlant tension et quasi-fantastique, Petit Paysan est l’occasion pour son réalisateur Hubert Charuel (lui-même agriculteur) d’évoquer la condition du monde paysan dans la France d’aujourd’hui. Difficultés financières, isolement, peur de l’échec… Interrogés au Salon de l’Agriculture, certains agriculteurs avouent leur amour pour le film, même s’ils déplorent son côté trop pessimiste quant à la description du monde paysan. Pourtant, la performance des acteurs est telle (Césars à l’appui) qu’on croirait voir un documentaire. Dans son inquiétant calme, traversé par des éclairs de violences, Swann Arlaud impressionne, tout comme Sara Gireaudeau qui confirme son grand talent après son rôle dans la série Le Bureau des Légendes. 

La mise en scène joue beaucoup sur la notion d’isolement : sa ferme est perdue au milieu d’une campagne dont on ne voit jamais les limites géographiques. La plupart des scènes se passent de nuit, accentuant ainsi la tension de l’événement. Petit Paysan, film d’horreur ? Au fil des minutes, on pourrait y croire (qui plus est, quand son titre anglais est Bloody Milk, soit « Lait Sanglant »). Sauf qu’en réalité, il faut voir ce long-métrage comme un véritable film d’ambiance qui prend le temps de poser son atmosphère et ses personnages. On sent qu’une menace plane mais celle-ci est informe, inatteignable… Le troupeau de Pierre est-il infecté ? Là n’est pas le plus important, subsiste surtout la quête d’un homme prêt à tout sacrifier pour le bien de son métier et de ses bêtes. Car perdre son troupeau serait perdre sa propre vie… Quitte à se mettre le village à dos, mais sûrement pas les spectateurs. Au drame rural se mêle le thriller fantastique: un mélange des genres inattendu mais captivant !

S’il y a un cinéma français à défendre, c’est bien celui de Petit Paysan et non pas des Tuches…

Théau Berthelot

 


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